Chères toutes et chers tous,
Le mois de mars a vu passer la Journée internationale des droits des femmes ; elle se déroule le 8 mars depuis 1975. Depuis, à la faveur de politiques publiques et d’organisations engagées, des progrès ont été réalisés. Ils tentent de corriger les injustices ancestrales flagrantes qui confinent les femmes dans un destin étroit, limité et souvent douloureux. Parmi les progrès, la santé maternelle se porte mieux. L’éducation des filles, qui sont 1,1 milliard sur la planète, est en hausse.
Pourtant, les menaces et reculs perdurent. Une femme sur trois a été ou sera victime de violences tout au long de sa vie. Une sur trois. Un écart salarial d’environ 23 % persiste dans le monde. Les femmes actives gagnent sensiblement 20 % de moins que leurs homologues masculins. Les femmes et les filles des régions en conflit sont 7,7 fois plus susceptibles de vivre dans l’extrême pauvreté. Seulement 26,5 % de tous les parlementaires nationaux sont des femmes. La liste de ces données est impressionnante par sa longueur et son constat sans appel : la moitié de l’humanité ne bénéficie pas des mêmes droits, opportunités et chances que l’autre moitié.
Que peut la littérature à cette forme de « pandémie » culturelle, sociale, politique, économique ? À cet écart de justice manifeste ?
Comme bien souvent, ses pouvoirs sont immenses et dans le même temps, ils semblent dérisoires par rapport à la tyrannie du réel.
D’abord, lire nous ouvre les yeux et développe notre empathie. C’est la fameuse « théorie de l’esprit ». Quand nous lisons l’histoire de personnages féminins qui souffrent et se relèvent, nous souffrons un peu avec elles. Et nous nous relevons sans doute aussi. Nous sollicitons une partie de notre cerveau qui se met « à la place de » et accède ainsi à une forme de vécu dont nous n’avions initialement que des bribes ou de vagues reconstitutions.
Lire, c’est aussi découvrir des autrices qui ont longtemps été invisibilisées. Louise Bourgeois fut interdite d’enseignement ; Élisabeth Vigée Le Brun fut freinée par son mari ; Flora Tristan fut mise au ban par sa famille maternelle puis reniée par son oncle. Et rebelote. Dans la vie des femmes, bien souvent, ce sont les hommes qui établissent les règles du jeu. Ils peuvent aussi les aider à réussir. Ce fut le cas de Josephine Butler, soutenue par Victor Hugo, ou encore de Marguerite Audoux, soutenue par Octave Mirbeau. Mais ils peuvent également les contraindre à se cantonner à un rôle domestique et secondaire.
« L’avenir peut s’éveiller plus beau que le passé. » George Sand, Aldo le rimeur
Enfin, lire, c’est éprouver la capacité à se projeter dans un autre monde. Car le monde brûle et les femmes passent leur temps à le réparer. Il est temps qu’elles le redéfinissent. Lire nous permet de dépasser nos croyances limitantes et d’échafauder des scénarios du possible et du désir. Demain, trouvez un livre qui vous donnera envie de réinventer le réel ! Vous reviendrez à la réalité, mais cette lecture aura changé quelque chose à votre vision du monde.
Cette newsletter est une ode aux femmes et à leur vitalité, aux hommes qui s’engagent à leurs côtés, à la résilience et aux livres qui nous guident dans cette quête d’émancipation.
Bonnes lectures !
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🎙 L’interview émotions : Pauline Hillier
À l’issue d’une manifestation à Tunis, une jeune française est arrêtée et conduite à La Manouba, la prison pour femmes. Entre ces murs, c’est un nouvel ordre du monde qu’elle découvre, des règles qui lui sont dictées dans une langue qu’elle ne comprend pas. Au sein du Pavillon D, cellule qu’elle partage avec vingt-huit codétenues, elle n’a pu garder avec elle qu’un livre, Les Contemplations de Victor Hugo. Des poèmes pour se rattacher à quelque chose, une fenêtre pour s’enfuir. Mais bientôt, dans les marges de ce livre, la jeune femme commence à écrire une autre histoire. Celle des tueuses, des voleuses, des victimes d’erreurs judiciaires qui partagent son quotidien, lui offrent leurs regards, leurs sourires et lui apprennent à rester digne quoi qu’il arrive.
© Vincent Loison
Pauline Hillier est née en Vendée et écrit depuis l’adolescence. Après des études de gestion culturelle à Bordeaux et une expatriation à Barcelone, elle écrit son premier roman, À vivre couché, paru en 2014 aux éditions ONLIT. Membre du mouvement international FEMEN de 2012 à 2018, elle participe à de nombreuses actions, en France comme à l’étranger. En 2013, elle est arrêtée à Tunis suite à une manifestation pour la libération d’une militante tunisienne. Son roman Les Contemplées lui a été inspiré par son séjour en prison.
1/ Si je vous dis émotions et littérature, à quoi pensez-vous ?
Au premier livre qui m’a émue aux larmes, Les raisins de la colère de Steinbeck.
2/ L’émotion que vous préférez voir chez quelqu’un ?
La joie.
3/ Le livre qui a suscité chez vous le plus de :
4/ Un des moments les plus émouvants de votre vie de lectrice ou autrice ?
La publication de mon dernier roman, hommage à mes codétenues tunisiennes.
5/ Le personnage de roman qui vous a le plus marquée ?
Modesta dans L’Art de la joie, pour sa résilience, sa liberté, son indépendance.
6/ L’auteur ou l’autrice qui vous touche le plus ?
Zola.
7/ Où et quand préférez-vous lire ?
Le soir, au lit.
8/ À qui offrez-vous des livres le plus souvent ?
Mon fils.
9/ Le livre qui a changé votre vie ?
Germinal de Zola.
10/ Quelles émotions prédominent dans votre dernier livre ?
La sororité, l’espoir, la révolte.
11 / Épilogue ; finissez la phrase suivante : « La littérature m’émeut quand… »
… elle s’engage.
📚 La readlist du mois
Ce mois-ci, Love for Livres vous invite à un voyage littéraire qui célèbre la force et la résilience de femmes ordinaires et extraordinaires.
1/ Fabriquer une femme, de Marie Darrieussecq, P.O.L, 2024
Fabriquer une femme suit l’entrée dans l’âge adulte de Solange et Rose, deux amies adolescentes dans les années 1980. Marie Darrieussecq dresse le portrait poignant de deux femmes en devenir et explore les complexités de l’apprentissage de la vie.
2/ Une enfance française, de Farida Khelfa, Albin Michel, 2024
Farida Khelfa raconte son enfance dans une famille d’immigrés algériens, marquée par la violence et la pauvreté. C’est l’histoire d’une petite fille qui a su se recréer et se faire une place dans un monde nouveau, une ode à la résilience et à la force de vie.
3/ Une si longue lettre, de Mariama Bâ, Nouvelles Éditions africaines, 1979
Une si longue lettre est une œuvre majeure pour ce qu’elle dit de la condition des femmes. Au cœur de ce roman, la lettre que l’une d’elle, Ramatoulaye, adresse à sa meilleure amie pendant la réclusion traditionnelle qui suit son veuvage.
4/ La première femme, de Jennifer Nansubuga Makumbi, Métailié, 2024
En 1975, sous la dictature d’Idi Amin Dada, Kirabo, une jeune femme ougandaise, cherche à découvrir l’identité de sa mère. Le roman explore les mythes sur la maternité, la sagesse féminine et le rôle des femmes dans la transformation des sociétés.
5/ Sans alcool, de Alice Rivaz, Zoé Poche, 2015
Ce roman est celui d’histoires de couples, d’hommes et de femmes qui déploient la fresque des relations humaines, régies par les inégalités, que ce soit dans les rapports de genre ou de classe.
6/ Loujain rêve des tournesols, de Lina AlHathloul & Rebecca Green, Les 400 coups, 2024 (à partir de 6 ans)
Cette histoire émouvante et poétique s’inspire de la vie réelle de Loujain AlHathloul, candidate au prix Nobel de la paix, qui a milité avec succès pour changer les lois en Arabie saoudite.
🧠 Les secrets de nos émotions : la résilience de notre cerveau expliquée par la neuroplasticité
La résilience se manifeste psychologiquement chez un individu confronté à des situations difficiles ou stressantes. Elle se définit par la capacité de l’individu à prendre conscience de l’événement traumatique et à s’adapter en surmontant les obstacles. Des études démontrent que la résilience est étroitement liée à ce que les neurosciences désignent sous le nom de plasticité cérébrale, également connue sous le terme de neuroplasticité. Cette notion fait référence à la capacité du cerveau à se réorganiser et à se remodeler en réponse aux changements de l’environnement. Les neurosciences fournissent des éclairages approfondis sur les mécanismes sous-jacents de la résilience en examinant la manière dont le cerveau traite et régule le stress et les émotions.
Une importante étude publiée dans la revue Nature début 2016 se penche sur la neurobiologie de la résilience, mettant en évidence des liens entre des zones cérébrales spécifiques telles que le néocortex cérébral, ainsi que, au niveau sous-cortical, le complexe amygdalien, l’hippocampe et le locus céruléen dans le processus de neuroplasticité.
En situation d’adversité, le cerveau réagit en expérimentant du stress et de l’angoisse émotionnelle, initiés par l’amygdale. Cette structure est responsable de nos réponses associées à la peur, orchestrant également l’envoi de signaux au cerveau pour libérer rapidement de l’adrénaline et du cortisol, préparant le corps à la fuite ou au combat.
Cependant, lorsque l’amygdale prend le contrôle, un phénomène très distinct se produit : le cortex préfrontal perd sa fonctionnalité. En d’autres termes, notre capacité à analyser objectivement la situation ou à réfléchir au problème diminue considérablement.
Le développement d’un cerveau plus résilient vise à éliminer cette coupure du cortex préfrontal, permettant ainsi une adaptation totale. En substance, la résilience implique de calmer l’amygdale pour activer le cortex préfrontal, réduisant le stress et favorisant une réponse plus réfléchie et robuste.
Sources :
https://outilsducoach.com/associer-resilience-coaching-et-neuroscience/
https://alexandre-antonienko.com/developpez-un-cerveau-resilient/
📬 Une histoire : George Sand et le pantalon
George Sand, autrice française du XIXe siècle, était une figure incontournable du mouvement féministe. Elle a lutté toute sa vie pour l’égalité des femmes et a défié les conventions sociales de son époque.
À une époque où les femmes étaient obligées de porter des robes longues et volumineuses, Sand a décidé de s’habiller en homme pour avoir plus de liberté de mouvement. Elle a été une des premières femmes à se promener dans les rues de Paris en pantalon, ce qui n’a pas été sans provoquer quelques scandales. Elle a été insultée, voire menacée par des hommes qui ne comprenaient pas comment une femme pouvait oser s’habiller d’une telle manière !
Mais Sand n’a jamais cédé à la pression sociale. Continuant à porter le pantalon, elle a toujours défendu le droit des femmes à s’habiller comme elles le souhaitent. Elle a ainsi encouragé de nombreuses femmes à se libérer des carcans de la société et à revendiquer leur liberté.
📜 Les citations du mois
« Je ne suis pas un oiseau, et aucun filet ne me prend au piège. » – Jane Eyre, Charlotte Brontë (1847)
« Je ne suis pas une femme qui cherche à se venger, mais une femme qui tente de surmonter. Je ne suis pas une femme qui pleure, mais une femme qui combat. » – Moi, Tituba sorcière, Maryse Condé (1986)
« Une enfant, un enseignant, un stylo et un livre peuvent changer le monde. » – Moi, Malala, Malala Yousafzai (2013)
✨ Actualités de Love for Livres et des livres
#1 – Sensibilisation à la bibliothérapie
Vous êtes curieuse, curieux, vous avez envie d’en savoir plus sur la bibliothérapie sans vous engager dans une formation complète ?
Nous avons décidé de proposer une session de synthèse, un condensé de la formation complète afin de vous offrir une introduction immersive et qualitative à cette discipline !
Accessible à toutes et tous, cette session est une première étape idéale pour explorer la bibliothérapie et son potentiel, pour vous-même ou pour les autres.
📅 Réservez dès maintenant votre place à notre premier atelier de sensibilisation, le 22 mars de 9h à 12h, en ligne !
Pour garantir votre participation (places limitées pour favoriser la qualité des échanges), nous vous invitons à compléter en 1 minute le formulaire disponible ici.
Une fois pré-inscrit(e), vous recevrez toutes les informations nécessaires afin de valider votre inscription.
Si, en revanche, vous souhaitez suivre une formation à la bibliothérapie plus approfondie, nous vous invitons à vous inscrire à l’un des parcours de formation de l’Academy ci-dessous 👇
#2 – Devenez bibliothérapeute avec Love for Livres Academy ! 💡
Nos formations complètes vous permettront d’acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour mener des ateliers de bibliothérapie de qualité grâce à nos trois parcours :
📚 Parcours « Immersion » : découvrez les principes et les pratiques de la bibliothérapie. Idéal après une introduction à la discipline via notre sensibilisation à la bibliothérapie.
📚 Parcours « Approfondissement » : améliorez vos connaissances et vos compétences en bibliothérapie ; développez votre créativité pour concevoir des ateliers originaux et efficaces.
📚 Parcours « Spécialisation » : devenez expert(e) de la bibliothérapie et accédez à des contenus et des ressources exclusives.
📅 Prochaines dates des sessions de présentation :
✅ 28/03 de 9h à 9h30
La formation de la Love for Livres Academy est accessible à toutes et tous, quel que soit votre niveau de formation ou votre expérience.
Pour des raisons de déontologie, nous serons en revanche attentifs au déploiement envisagé au moment de votre inscription en fonction de votre parcours et votre expérience.
👉 Vous souhaitez accompagner les autres à travers les livres et la lecture ? Inscrivez-vous à une de nos sessions de présentation (30 minutes) sans engagement, par 👉 ici.
#3 – Le carnet des émotions pour les jeunes !
Dans le cadre du programme « Les Ailes de la fiction » déployé auprès des enfants placés à l’Aide sociale à l’enfance sous l’égide de l’association IM’PACTES, Love for Livres a créé un nouvel outil destiné aux enfants et aux adolescents : le carnet des émotions. Ce carnet, également disponible en « version adultes », est un outil d’accompagnement innovant qui crée du lien entre les sessions de bibliothérapie proposées au sein des Maisons d’enfants à caractère social (MECS) dans lesquelles nous intervenons et les Bibliothèques des possibles que nous y installons.
Ce carnet comporte des idées de lectures, des clés issues des apports des sciences cognitives, des jeux et des activités, des conseils malins sur le fonctionnement du cerveau et aborde les manières de gérer son stress et ses émotions pour avoir confiance en soi. Il est divisé en 6 sections qui reprennent le titre de chacune des sessions de bibliothérapie du programme :
1 – Se faire confiance
2 – Apprivoiser ses émotions
3 – Imaginer et créer
4 – Vivre en relations
5 – Explorer et découvrir
6 – Passer à l’action et se dépasser
→ Le carnet contient aussi une partie « Carnet d’écrivain » où les jeunes peuvent s’exprimer librement, inventer des histoires ou écrire leur propre récit de vie.
Vous aussi, vous voulez utiliser un carnet des émotions ?
Contactez-nous !
#4 – L'épisode 10 de notre podcast, 6 minutes par Love for Livres, est disponible ! 🎙
Cet épisode spécial 8 mars célèbre la Journée internationale des droits des femmes avec 8 minutes de lecture !
Lors de la campagne HeForShe lancée par ONU Femmes aux Nations Unies, Emma Watson, ambassadrice de cette initiative, invite les hommes à rejoindre la lutte pour l’égalité des sexes.
Mobilisant hommes et garçons en faveur de l’égalité, elle défend le fait que l’égalité des sexes est également une cause qui les concerne. À travers ce texte, Emma Watson espère encourager chacun à créer un monde où les préjudices envers les femmes ne seront plus tolérés, et où les hommes pourront pleinement embrasser leur humanité.
Ce texte nous invite tous et toutes à nous joindre à la lutte pour l’égalité des sexes, soulignant que l’inaction ne ferait que perpétuer l’injustice.
Nous espérons que ce nouvel épisode vous plaira !
Écoutez notre podcast 👉 ici
#5 – Festival du Livre de Paris 2024 : le Québec à l’honneur !
Après l’Italie en 2023, c’est la scène littéraire québécoise qui est mise en avant cette année, témoignant de la richesse et de la diversité de la francophonie. Elle rencontre depuis quelques années en France un succès retentissant : elle se voit programmée au baccalauréat et reçoit plusieurs prestigieux prix d’automne.
Pendant ces trois jours de festivités au Grand Palais Éphémère et hors les murs, plus de 40 autrices et auteurs, illustratrices et illustrateurs québecois(es) et plus de 60 maisons d'édition seront présents à Paris, à la rencontre du public français. Des stands d’exposition seront mis en place pour présenter les dernières nouveautés éditoriales et permettre aux visiteurs de découvrir les univers des écrivain(e)s québécois(es).
Cette célébration littéraire ne se limite pas seulement aux rencontres avec les auteurs et autrices et aux séances de dédicaces. En effet, un programme varié d’événements est prévu, comprenant des tables rondes, des conférences ou encore des ateliers d’écriture qui mettront en avant la culture québécoise sous toutes ses formes.
Présentation de la bibliothérapie par Céline Mas à la médiathèque Nelson Mandela de Créteil dans le cadre des journées de découvertes des métiers innovants de demain
#6 – La bibliothérapie à l’honneur dans Livres Hebdo
Approcher la lecture du point de vue de la santé en collaborant avec des professionnels est l’un des objectifs du Centre national du livre pour l’année 2024. À titre d’exemple, certaines bibliothèques font désormais appel à des experts en thérapie par le livre, démontrant ainsi comment les maux persistants peuvent être traités efficacement par le pouvoir apaisant des mots.
Dans cet article, aux côtés d’autres professionnels, découvrez un extrait de l’interview de Céline Mas, cofondatrice de Love for Livres. Elle nous éclaire sur le déroulement d’une séance de bibliothérapie, ses avantages et son fonctionnement. Les ateliers de bibliothérapie que nous proposons visent à rendre la lecture plus accessible pour les non-lecteurs assidus, tout en offrant une exploration des émotions grâce à la combinaison de la littérature et des sciences cognitives.
Un article de Fanny Guyomard.